Les députés votent l'amendement du gouvernement qui supprime la priorité au logiciel libre pour le futur service public du numérique éducatif

Paris, le 4 juin 2013. Communiqué de presse.

Les députés, lors de la seconde lecture du projet de loi de refondation de l'école de la République, ont voté en séance publique en faveur d'un amendement gouvernemental visant à refuser la priorité au logiciel libre pour le futur service public du numérique éducatif. L'April dénonce une manœuvre au service d'intérêts privés et au détriment de l'intérêt général.

Le Sénat, en première lecture, et la commission des Affaires culturelles et de l'Éducation de l'Assemblée nationale, en seconde lecture, avaient voté une disposition qui donne la priorité au logiciel libre et aux formats ouverts dans le futur service public du numérique éducatif (alinéa 7 de l'article 10). Malheureusement, le gouvernement, cédant sans aucun doute aux pressions de l'Afdel, du Syntec Numérique et de l'Afinef, avait deposé un amendement n° 359 vidant cette disposition de sa substance.

Lors de la séance publique ce mardi 4 juin vers minuit, l'amendement n° 359 a été soumis à la discussion puis au vote. Malgré le vote de la disposition initiale en commission des affaires culturelles et de l'éducation, Yves Durand, rapporteur de ladite commission, a émis un avis favorable à l'amendement du gouvernement arguant de difficultés juridiques et non politiques avec la formulation actuelle de l'alinéa 7 de l'article 10. Il a notamment expliqué que, selon l'argumentation de Vincent Peillon, inscrire la priorité au logiciel libre dans la loi serait contraire au droit européen de la concurrence. Nous serions ravis de lire l'analyse détaillée juridique appuyant cette affirmation. Car, pour le moment, le gouvernement procède par affirmations non étayées sur ce point.

« La priorité au logiciel libre introduite par le Sénat est parfaitement légale, et validée par le Conseil d'État dans sa décision du 30 septembre 2011. Nous demandons au gouvernement de publier une analyse juridique étayant ses propos » a déclaré Jeanne Tadeusz, responsable affaires publiques à l'April.

Les députés Barbara Pompili (groupe Écologiste), Laurent Grandguillaume (groupe Socialiste, républicain et citoyen) et Thierry Braillard (groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste) sont intervenus en défaveur de l'amendement du gouvernement. Ils ont demandé le maintien de la disposition initiale qui donnait la priorité au logiciel libre pour le futur service public du numérique éducatif.

Barbara Pompili a notamment expliqué que, face à la force économique des logiciels propriétaires, laisser se faire les choses ne suffisait pas. Les forces en jeu étant dissymétriques, il faut des politiques beaucoup plus volontaristes en matières de logiciels libres. Et l'alinéa 7 de l'article 10 en l'état était une petite avancée. Barbara Pompili a continué en expliquant que le retrait de la priorité au logiciel libre pourrait être vu par beaucoup comme une forme de soumission qui serait difficilement justifiable. Elle a fini en rappelant que les logiciels libres et les formats ouverts sont les seuls à permettre un accès égalitaire et pérenne aux ressources numériques et que promouvoir les logiciels libres c'est l'essence même de l'esprit de solidarité et d'égalité républicain.

« Nous ne pouvons qu'approuver les propos de la députée Barbara Pompili. La référence par le ministre Vincent Peillon à la circulaire Ayrault sur le logiciel libre est en effet un cache-sexe pour masquer le refus du gouvernement de mettre en place une politique publique donnant la priorité au logiciel libre » a déclaré Frédéric Couchet, délégué général de l'April.

La vidéo des débats est disponible (à partir de 7mn20) ainsi que le compte-rendu.

L'amendement du gouvernement, soumis au vote, a été cependant adopté par les députés.

Avant ce vote, l'article 10 porte sur le futur service public du numérique éducatif et son alinéa 7 était rédigé ainsi :

« Ce service public utilise en priorité des logiciels libres et des formats ouverts de documents. »

Après le vote de l'amendement du gouvernement, l'alinéa 7 devient :

« Dans le cadre de ce service public, la détermination du choix des ressources utilisées tient compte de l’offre de logiciels libres et de documents au format ouvert, si elle existe. »

Le feuilleton continue cependant et la mobilisation doit se poursuivre. L'examen du projet de loi sur la refondation de l'école de la République se poursuit en séance publique à l'Assemblée nationale et sera ensuite examiné, en seconde lecture, au Sénat.